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Amélioration des connaissances, sensibilisation et mobilisation sont des éléments clés pour engager une dynamique autour de la qualité de l’air

L’étude Plan’Air « Intégration de la qualité de l’air dans les PCAET » (ATMO France, 2022 - https://librairie.ademe.fr/air-et-bruit/5467-integration-de-la-qualite-de-l-air-dans-les-pcaet.html) visait à dresser un premier bilan de la prise en compte de l’air dans les PCAET par les élus et parties prenantes. L’intégration de la qualité de l’air dans les PCAET est relativement récente et la mise en cohérence air-climat énergie pose question à certaines collectivités. La difficulté majeure réside dans la méconnaissance de la réglementation, des acteurs et de la thématique « Air » par les acteurs du territoire : associations, acteurs économiques (agriculteurs, entreprises) et citoyens. Cette partie s’intéressera à la sensibilisation de tous ces acteurs.

Information et acculturation des acteurs du territoire
La qualité de l’air est un enjeu de santé publique. Les effets des polluants sur la santé humaine sont aujourd’hui documentés et connus. Pour faciliter la prise de conscience par tous de cet enjeu, la collectivité doit aborder la qualité de l’air de façon globale et prendre en compte tous les polluants émis sur le territoire, même ceux qui ne sont pas réglementés, car ils peuvent concerner une population spécifique.
Par exemple, en zone rurale, l’ammoniac, émis majoritairement par le secteur agricole, est le principal polluant en cause, bien qu’il ne soit pas soumis à réglementation. Ce gaz très polluant a pourtant un impact direct sur l’environnement (pluies acides, eutrophisation des milieux), sur la qualité de l’air ambiant et sur la santé humaine.

Le lien entre santé et qualité de l’air est un levier intéressant car tous les secteurs d’activités et tous les publics sont concernés. La collectivité peut faire de la qualité de l’air une priorité pour l’action commune.

On peut mentionner ici Rodez Agglomération, qui a inscrit la lutte contre la pollution atmosphérique comme un axe fort de sa politique territoriale : mise en place d’un dispositif de surveillance de la pollution, cartographies de zones à enjeux jusqu’à l’échelle des quartiers, information auprès des habitants et du grand public, mise à disposition d’informations sur les sources de polluants en fonction de leur origine.

La publication quotidienne de l’indice qualité de l’air de l’ATMO sur le site de la collectivité, est une démarche intéressante qui permet un premier niveau de communication sur l’état des lieux à l’échelle locale. Cette diffusion peut être accompagnée de recommandations et d’éléments de compréhension pour en faciliter l’appropriation par les populations.

Documentation atmo

La collectivité peut aussi communiquer autour d’autres contenus : proposer des éléments pédagogiques pour informer sur la réglementation sur l’air, évoquer la question du coût de l’inaction ou celle de l’attractivité du territoire par exemple. L’information peut aussi être élargie à l’air intérieur, aux pollens et aux odeurs.
L’important est de privilégier des éléments pédagogiques et synthétiques, afin de capter l’attention des différents publics pour les acculturer à la thématique air et inciter au passage à l’action, à l’échelle individuelle et collective.

Le PNR des Pyrénées Ariégeoises dédie une rubrique de son site à la qualité de l’air. Celle-ci donne des informations pour orienter le visiteur dans sa recherche d’informations sur la qualité de l’air, intérieur et extérieur, mais aussi sur la réglementation, les actions à mener, les acteurs ressources.

Le SICOVAL, dans le cadre de la journée nationale de la qualité de l’air 2022, a mis en place un programme d’animation « Changeons D’AIR : Ensemble, AGISSONS pour mieux respirer ! » à destination des différents acteurs :

  • Rendez-vous et ateliers de sensibilisation pour les agents du Sicoval autour de la qualité de l’air ambiant et intérieur (expositions, jeux, ateliers de fabrication de produits d’entretien ménagers naturels, tawashi, écogestes …).
  • Information et communication ciblées vers les entreprises du territoire sur l’actualité qualité de l’air : la ZFE de l’agglomération toulousaine, les impacts pour les entreprises, les dispositifs d’aides au verdissement des flottes de véhicules et la mise en place du Fonds Air Véhicules, prime pour les professionnels, proposée avec le soutien financier de l’ADEME, dans une démarche commune d’animation et d’instruction des demandes avec la Communauté d’Agglomération du Muretain.
  • Communication grand public sur les réseaux sociaux et sites Internet du Sicoval et des 36 communes.

 

Le programme « APPEL D’AIR », un programme de sciences citoyennes et de sensibilisation active à la qualité de l’air.

Appel d'air
L’observation de la qualité de l’air et les connaissances scientifiques ont progressé ces dernières années. Les liens entre exposition aux polluants atmosphériques et santé sont de mieux en mieux connus et relayés auprès du grand public. Signe de l’intérêt du grand public, les pratiques citoyennes d’observation de la pollution de l’air bénéficient d’une popularité croissante : sciences participatives, enregistrement de concentrations de polluants par des micro capteurs…

L’URCPIE Occitanie coordonne et met en œuvre depuis 3 ans un programme de sciences et de mobilisation citoyenne sur la qualité de l’air, intitulé "Appel d’Air", en partenariat avec l’ARS, la Région et la DREAL. Les objectifs de ce projet sont :

  • de favoriser l’appropriation par les citoyens de connaissances scientifiques sur la qualité de l’air,
  • d’informer et sensibiliser les citoyens sur la pollution de l’air pour qu’ils soient en capacité d’agir dans leur lieu de vie,
  • de développer l’interconnaissance entre société civile, citoyens et monde de la recherche,
  • de sensibiliser le public (jeunes et habitants) aux problèmes de la pollution de l’air via la fabrication puis l’installation chez eux de capteurs actifs de mesure de particules fines (2,5 et 10 microns).

Article9 illustration des ateleirs de l'URCPIE
La démarche proposée passe par l’appropriation de connaissances scientifiques qui permettent aux citoyens de s’impliquer dans la vie de leur territoire et de faciliter leur passage à l’action.
Ce dispositif a été déployé et expérimenté sur plusieurs territoires d’Occitanie, en concertation avec les collectivités locales engagées dans des PCAET, PPA, ZFE. Il visait à générer des changements de comportements, via la construction et l’installation de capteurs actifs de mesure de particules fines (PM 2,5 et PM 10), en s’appuyant sur le dispositif européen de sciences citoyennes de la Sensor Community. Il a permis aux participants de se questionner sur les sources de pollutions et ses impacts, de partager et analyser des données entre territoires, d’agir pour réduire la pollution atmosphérique et s’en protéger.

 

8 territoires différents ont été concernés en Occitanie, sélectionnés pour leur diversité de situations (rural, urbain, littoral) et en ciblant les zones prioritaires concernées par un PPA, une ZFE ou un PCAET :
CPIE Bigorre-Pyrénées  : Communauté de Communes Pyrénées Vallées des Gaves et Communauté d’Agglomération Tarbes Lourdes Pyrénées
CPIE Bassin de Thau  : Frontignan et Sète
CPIE-APIEU Territoires de Montpellier  : Montpellier
CPIE du Rouergue  : PNR des Grands Causses, Millau
CPIE de l’Ariège  : Alzen
CPIE Terres Toulousaines : Sicoval, Toulouse Métropole
CPIE Pays Tarnais  : Castres et Réalmont
CPIE du Gard  : Nîmes et Vauvert
Les collectivités participantes ont noté un réel intérêt pour le projet et la démarche des sciences citoyennes. Plusieurs autres points positifs ont été notés : faible coût des capteurs, projet pluridisciplinaire (biologie, pollution, environnement, numérique, santé, citoyenneté…), variété des activités proposées (théories, manipulations, analyse), appropriation d’un capteur fabriqué de ses propres mains (valorisant pour les participants), possibilité de suivi sur le long terme pour les participants.

 

La mobilisation et la participation de tous les acteurs du territoire est indispensable pour relever le défi d’un air sain.
Diverses modalités d’échanges sont accessibles aux collectivités pour mobiliser les différents acteurs du territoire : ateliers et réunions (publiques, avec les associations de quartier) pour la mise en place d’actions ; plateformes numériques pour la consultation des citoyens ; espaces de débat (conférence, projection de film, apéro, théâtre) ; implication du Conseil de Développement ; actions en lien avec le milieu scolaire (collèges, lycées).
Les collectivités doivent veiller à associer les acteurs économiques tels que les agriculteurs ou les entreprises. Ce sont des acteurs du territoire à sensibiliser aux enjeux de la qualité de l’air, pour arriver à les mobiliser dans la mise en œuvre des plans d’actions.
Atmo : rencontre avec les acteurs économiques

Mais la mobilisation n’est pas toujours suffisante pour enclencher une dynamique territoriale. Une dimension incitative accompagnée d’un discours fort, avec des objectifs en termes de santé par exemple, doit être pensée pour développer une stratégie de communication relative à l’amélioration de la qualité de l’air.
Un accompagnement au changement de pratiques peut-être aussi être nécessaire. Les nudges peuvent être un bon outil pour faire évoluer les pratiques.
Les nudges s’appuient sur la façon dont un environnement peut conditionner la décision individuelle. Un exemple de nudge pour valoriser les citadins qui utilisent le bus plutôt que la voiture serait l’installation d’un compteur dynamique à l’intérieur d’un bus pour illustrer l’équation : nombre de voyageurs dans le bus/pollution en moins rejetée dans le quartier.

La collectivité doit veiller à développer une stratégie de communication et d’information reposant sur des messages visant à promouvoir une bonne qualité de l’air en agissant sur ses propres usages, ses comportements de consommation et ses pratiques, et en les illustrant par des données narratives plutôt que par des statistiques.
Par exemple pour favoriser le report modal vers les transports en commun et le covoiturage, un message positif et engageant, comme par exemple « utilisez le covoiturage » est plus efficace qu’un message à connotation négative de type « renoncez à la voiture individuelle ».

L’ADEME a réalisé des études et formulé des propositions sur l’accompagnement au changement. Pour accéder aux résultats de ces travaux :
Changer les comportements, faire évoluer les pratiques sociales vers plus de durabilité
PUNCH : persuader les urbains de changer de mode de transport au quotidien pour améliorer la qualité de l’air
Représentations sociales de la qualité de l’air intérieur et évolution des comportements